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La Suède, plus égalitaire ou juste différent ?

La Suède, plus égalitaire ou juste différent ?

Auteurice Valérie Vuille, 5 juillet 2017
Type de publication

Les pays nordiques, comme la Norvège ou la Suède sont souvent cités comme exemples lorsque l’on parle d’égalité. Perçu comme un oasis féministe pour certainEs, où est la vérité. Esther Nilsson a 20 ans et vit justement Suède, où elle y étudie la médecine. Elle nous parle de son pays, de ses doutes, mais aussi de ses fiertés.

Publié par Valérie Vuille, le 05.07.2017

Tu es une féministe revendiquée et très engagée. Qu’est-ce que le féminisme pour toi et comment vis-tu ton engagement au quotidien ?

Être féministe et femme n’est pas toujours facile. Il y a des normes dans la société qui nous disent ce que nous devons faire pour maintenir notre position de femme et nous les ressentons quotidiennement. Notre société est encore construite sur un modèle, où les femmes subissent beaucoup plus de discriminations que les hommes.

Par contre, je trouve personnellement qu’il y a autant de règles pour les hommes que pour les femmes. Les hommes ne se permettent pas de pleurer ou de montrer leurs sentiments alors que pour les femmes c’est plus facile. A mon avis, être féministe, c’est voir tous les problèmes de notre société en parlant des injustices entre sexes.

Lorsque l’on dit aux gens que l’on est féministe, on peut très vite être perçuE comme une menace. Les gens commencent à vouloir défendre les normes et essayent de trouver des arguments contre le changement. Je trouve cela très nuisible et dommage.

Pourtant ça ne te retient pas et tu es dans une association en Suède n’est-ce pas ? Parle nous un peu de ton engagement.

Effectivement, je suis engagée dans l’association Kärleksakuten, qui fait partie de IFMSA, International Federation of Medical Students’ Association, l’organisation des étudiantEs la plus grande au monde. Nous sommes mandatéEs pour parler de l’anatomie des organes sexuels masculins et féminins, mais aussi pour parler des maladies vénériennes et de la thématique LGBTQI. Je me suis engagée parce que je trouve qu’il y a trop d’idées dans la société qui disent aux jeunes et aussi aux adultes, bien sûr, comment être et agir dans les situations sexuelles et moi, je trouve que ces idées sont nuisibles. Et je veux faire partie d’une organisation où on peut influencer les jeunes et leur présenter la sexualité comme quelque chose de positif.

En Suisse, les « pays nordiques » Suède, Norvège etc… sont souvent vécus comme des exemples en matière d’égalité. Toi qui a aussi habité en Suisse un moment, quel regard portes-tu sur cela? Est-ce que tu as l’impression que c’est justifié ?

Personnellement je trouve qu’en Suède et dans les pays nordiques, on parle beaucoup plus du féminisme. Il est également beaucoup plus intégré dans le climat politique. C’est une question importante pour les femmes, les jeunes , et en général pour tout le monde. Ce que je trouve dommage, c’est que certainEs politicienNEs se prétendent féministes sans l’être vraiment, mais plutôt pour améliorer leur image. IlsELLES ne font pas de propositions concrètes et le sujet tombe rapidement dans l’oubli.

En Suisse, nous nous battons depuis plusieurs années pour obtenir un congé paternité. Que penses-tu toi du modèle de congé parental en Suède ? Tu as l’impression que c’est la bonne solution pour apporter plus d’égalité au sein de la famille ?

En Suède le congé paternité est de trois mois et je trouve que c’est un bon chemin à prendre pour obtenir plus d’égalité dans les familles. C’est après l’arrivée d’un enfant que les différences et les injustices au sein du couple sont les plus flagrantes et récurrentes. La société nous dit encore que les femmes doivent rester à la maison et les hommes doivent travailler. Ces impératifs sont encore très forts. Changer les choses dès l’arrivée des enfants, permettre au père de rester à la maison et aux mères de bouger et de continuer leur vie professionnelle est à mon avis essentiel.

Comment s’organise le travail institutionnel pour l’égalité en matière de politique en Suède ? Est-ce que tu as l’impression que cela fonctionne et qu’il y a assez de choses présentes ?

Malheureusement, on n’a pas un département propre au travail de l’égalité. On a des départements de l’éducation, du marché du travail, des questions sociales, dans lesquels les questions de l’égalité peuvent faire parties. On n’a pas non plus un ministre uniquement pour l’égalité de sexes. On a une ministre, qui est aussi ministre des questions des enfants et des plus âgéEs. Je trouve que c’est dommage que l’on n’ait pas de ministre pour l’égalité de sexes, mais je comprends qu’il n’y ait pas un département spécifique pour cela, car nous avons seulement dix départements au total.

La Suède a fait aussi tout un travail pour neutraliser la langue (Création du pronom « hen »). Qu’en penses-tu ? Est-ce que ça a été utile ? Est-ce que tu as l’impression que c’est utilisé ?

Moi, j’adore « hen »! C’est tellement pratique et utile. Je l’utilise fréquemment! Chaque fois que l’on doit décrire quelque chose dans les termes généraux, on peut utiliser « hen ». Surtout quand on écrit des articles plus formels et on ne veut pas constamment répéter « la personne » où « il ou elle », là « hen » est la solution! D’abord quand j’ai utilisé ce mot, les gens ont réagi bizarrement et ne savaient pas ce que je voulais dire, mais maintenant, c’est un mot plus fréquent dans les médias et les débats politiques et sociaux, alors les gens sont plus habitués.

Dernière question si tu devais encore donner une chose à améliorer dans ton pays, quelle serait-elle ?

C’est une question impossible. S’il y avait une solution miracle, l’égalité serait beaucoup plus facile à atteindre et il y a encore tant de choses à améliorer. Pour moi, la lutte la plus importante est l’ouverture du dialogue. Il faut pouvoir parler librement, haut et fort, des inégalités. Il est très important de faire comprendre aux gens qu’il y a des injustices qui sont nuisibles pour toute la société et que c’est un mouvement dans lequelle ils sont tous bienvenus. Et c’est aussi ne jamais s’arrêter, de continuer de lutter malgré les revers.

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