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« Shokofabrik », un centre féministe à Berlin

« Shokofabrik », un centre féministe à Berlin

Auteurice Iris Bouillet, 27 octobre 2017
Illustrateurice
Type de publication

C’est dans le quartier alternatif de Kreuzberg qu’est située Shokofabrik, le plus grand centre réservé aux femmes, rénovation d’une ancienne usine de chocolat, et reprise par un collectif féministe dans les années 80. DécadréE part à sa découverte.

Publié par Iris Bouillet le 27.10.2017

Avec une fréquentation de près de 800 femmes par semaine, le succès du lieu n’est plus à prouver, ni sa réputation à faire. Proposant une offre unique, riche et variée en services, ce centre joue à la fois le rôle d’employeur, de projet social, et d’immeuble résidentiel. « Shoko » s’insère donc parfaitement dans le quartier de Kreuzberg, célèbre pour sa mixité et sa diversité. Lors de sa création en 1980, le centre a été conçu comme un projet émanant d’un mouvement de femmes féministes, dont le but était de soutenir ainsi que de donner du pouvoir aux femmes, aux lesbiennes et aux filles. Aujourd’hui, ce lieu permet donc aux femmes de se rencontrer, de se réunir, d’échanger leurs idées et de partager leurs expériences.

Ce que le collectif offre, c’est le plus grand espace d’Europe – recouvrant 1200 m2 – dédié aux femmes et aux lesbiennes, comme précisé en ligne. S’étalant sur six étages, le centre fournit un service de conseils sociaux et psychologiques, par exemple en proposant de l’aide dans les démarches sociales ou en animant des discussions de groupe. Un service d’éducation est également à disposition, avec diverses formations et workshops à la clé, tout autant que des activités plus ludiques, tels que la danse, la gymnastique, le yoga…mais aussi un hammam ! C’est donc dans une ambiance aux odeurs d’huiles essentielles que ces femmes peuvent profiter d’un moment de détente, partager un moment de bavardage entre amies au petit café, ou encore se réunir pour travailler dans l’atelier, où elles peuvent créer des meubles qu’elles vendront par la suite, la rente de ce commerce étant reversée à l’association.

Annelie travaille en tant qu’assistante sociale depuis 2016 dans le centre. Elle s’occupe principalement de toute la gestion administrative. Pour elle, l’un des projets les plus chouettes est celui lancé il y a une année : le “Repair Café”. Il s’agit d’un rendez-vous organisé chaque mois, où les femmes amènent leurs appareils électriques endommagés. Elles s’entraident alors, dans le but de les réparer, car plusieurs de ces femmes ont des compétences en tant qu’électriciennes par exemple, ou travaillent simplement dans ces domaines. Ce projet s’inscrit donc non seulement dans une idée écologique de développement durable, mais vise aussi à déconstruire les clichés de genre, dont celui qui voudrait que les femmes ne soient pas apte à ce genre de métiers. Enfin, des femmes de tous âges peuvent se rencontrer, et cela permet un brassage entre les générations, autour de la réparation de ces appareils. Plusieurs nouveaux projets voient donc le jour au fil du temps, comme le “Telefonkrise”, un service permettant aux femmes de recevoir une aide par téléphone.

Une histoire et un quartier

Kreuzberg, le lieu idéal pour s’installer. En effet, avant que le Mur ne soit détruit en 1989, il figurait parmi les quartiers les plus multiculturels de Berlin, attirant ainsi des militantEs alternatifsIVES et diversES artistes. Aujourd’hui, il est aussi l’emblème de la culture punk, et connaît une importante immigration turque, d’où son surnom « la petite Istanbul ». Très connu pour ses milieux d’extrême gauche et écologiques, le quartier regorge de bars, restaurants, maisons closes et nightclub, ce qui en fait l’un des lieux les plus animés de Berlin. Mais derrière une richesse culturelle se cache également un phénomène de gentrification et de drogue très important[1], qui entache l’harmonie du quartier. La très fameuse réputation “poor but sexy” de la capitale allemande attire en effet un flux de jeunes touristes, promptEs à faire tourner le commerce de drogue lors d’un rapide week-end Easyjet. Ce problème de drogue est notamment dû à l’afflux particulièrement conséquent par rapport aux autres pays de réfugiéEs en Allemagne qui, une fois arrivéEs sur le territoire, ne sont pas autoriséEs à travailler.

Kreuzberg est également perçu comme un milieu également très masculin, d’où son autre surnom « SO 36 », ancien code postal du quartier repris par un gang masculin menant des actions violentes dans les années 80. L’étiquette d’une jeunesse violente et masculine reste encore collée au quartier, notamment à cause de la mauvaise publicité qu’en font les médias. Cette idée négative dérangeant le collectif féministe, il répond en 2008 par la campagne « We are Kreuzberg-36 ladies ». Cette opération visait à montrer le quartier sous un autre jour, en visibilisant et reconnaissant le travail entrepris par les femmes pour enrichir non seulement le district, mais au-delà toute la ville de Berlin. Comme le collectif le résume sur son site : « Don’t just look at the bad boys; finally look at the girls! » (Ne vous focalisez pas seulement sur les bad boys, prêtez enfin attention aux filles!).

Si vous passez par Berlin, allez donc profiter – si vous êtes une femme – de cet espace exclusif pour jouir d’un moment agréable et chaleureux !

 

 

[1] PATERSON, Tony. “Kreuzberg : Berlin’s hip district becomes a battleground between dealers and gentrification.” In : Indendant, mis en ligne le 7 décembre 2014. URL : http://www.independent.co.uk/news/world/europe/kreuzberg-berlin-s-hip-district-becomes-a-battleground-between-dealers-and-gentrification-9909118.html

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